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Historique

Écotopie – laboratoire d’écopédagogie est à l’origine une association de fait, créée en 1988 sous le nom d’Institut d’Éco-Pédagogie. En 1991, l’association se constitue en ASBL. En 2020, l’association change de nom.

Contexte

La création de l’Institut d’Eco-Pédagogie (IEP), comme celle de toute association éducative, s’inscrit non seulement dans un contexte socioculturel et politique donné mais aussi dans une trajectoire historique. C’est à ce titre qu’il est important et intéressant d’en proposer une lecture, afin de mieux situer l’action contemporaine de l’IEP et la relier à d’autres trajectoires connexes.

Cette lecture peut être utile non seulement aux personnes qui côtoient l’IEP, mais aussi plus largement à tout public qui s’intéresse aux histoires des mouvements socioculturels et aux interactions qu’elles révèlent. En ce sens, la petite histoire de l’IEP constitue un maillon dans le grand écosociosystème où l’éducation permanente a pris forme et contribue à influencer l’évolution de ce système. Plus largement encore, notre petite histoire est une trace parmi d’autres d’une évolution des mentalités et des valeurs à l’échelle de la planète.

Ainsi donc, l’Institut d’Eco-Pédagogie (IEP) a été constitué comme association de fait en 1988 et en A.S.B.L. en mai 1991.

1988, c’est l’année où eurent lieu les premières rencontres des acteurs de l’Education relative à l’Environnement (ErE) en Belgique francophone, à Roisin, organisées et tenues par le Centre Permanent d’Éducation à la Conservation de la Nature de Mariemont. Dans le prolongement des conclusions de ces rencontres, cinq partenaires associatifs, réunis en association de fait sous le nom d’Institut d’Eco-pédagogie, ont décidé de travailler ensemble pour construire un programme de formation innovant en Belgique francophone. Ces Cinq associations fondatrices sont : Education-Environnement, Nature et Loisirs, le Parc Naturel Hautes Fagnes-Eifel, le Centre permanent d’éducation à la conservation de la nature de Mariemont et l’Atelier du Campagnol.

Les personnes qui oeuvraient dans ces associations ressentaient le besoin de se démarquer de la formation « guides-nature » existante et d’initier une véritable recherche afin de mettre au point des façons de faire différentes. Jusqu’alors, en effet, les méthodes de sensibilisation étaient le plus souvent très classiques (des ballades « nature » commentées par un guide naturaliste) et centrées sur l’acquisition de connaissances scientifiques. Elles cadraient mal avec les objectifs de l’éducation relative à l’environnement définis à plusieurs reprises au niveau international dans les années septante. Une rapide rétrospective permet de le comprendre.

De la protection de la nature à la défense de l’environnement

Historiquement, le souci de protéger la nature mise à mal par le développement de l’industrialisation date du milieu du XIXe siècle. C’est alors que les premières lois de protection d’espèces en danger furent votées dans notre pays. S’en suivirent la protection des bâtiments anciens et des paysages, ainsi que des monuments et sites remarquables.

Les premières associations de protection de la nature furent créées avant la deuxième guerre mondiale (Amis de la Nature, Amis de la Fagne, Ligue Belge de Protection des Oiseaux). La première réserve naturelle en Wallonie date de 1943 (à Torgny). Après la deuxième guerre mondiale, le mouvement se poursuivit avec la création de l’Union internationale pour la protection de la nature (UICN) en 1948.

C’est en 1950 qu’émergea officiellement l’idée de la nécessité d’une éducation à la protection de la nature (en l’occurrence, des oiseaux), qui accompagna la création de l’asbl « Réserves naturelles et ornithologiques de Belgique » en 1951. Les années cinquante virent la création de plusieurs réserves naturelles et le début d’une initiation des jeunes par les Cercles des Naturalistes et Jeunes Naturalistes de Belgique, asbl créée en 1957.

La prise de conscience de la gravité des problèmes environnementaux a pris de l’ampleur à partir des années 60, avec l’usage des pesticides au Vietnam par les américains, puis dans les années 70, suite à la marée noire résultant du naufrage du Torrey-Canyon en 1967, au large des côtes britanniques.

Plusieurs associations importantes de défense de l’environnement ont été créées à l’époque en Belgique : le World Wildlife Fund – WWF Belgique en 1966, les Amis de la Terre et Inter-Environnement en 1971, Inter-Environnement Bruxelles en 1973, Inter-Environnement Wallonie en 1974. Mentionnons aussi la création de l’asbl Nature et Loisirs en 1972, qui deviendra une des associations fondatrices de l’IEP.

Le 12 juillet 1973, le Parlement belge a adopté la loi-cadre sur la conservation de la nature.

L’ONU prône l’éducation relative à l’environnement à l’échelle internationale

Le coup d’envoi de la dimension éducative du combat pour la défense de l’environnement fut véritablement donné par la première Conférence des Nations Unies sur l’environnement à Stockholm, en 1972, sur le thème « Une seule terre », où fut recommandée la mise en place d’un programme international en ErE (Déclaration de Stokholm, 1972).

Dans la foulée, est né le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE), qui servit de base à l’UNESCO pour formuler les premiers principes et recommandations de l’ErE lors de la Conférence internationale de Belgrade en 1975 :

Le but de l’Éducation relative à l’Environnement est de « former, à l’échelle mondiale, une population consciente et préoccupée de l’environnement et des problèmes qui s’y rattachent et qui, par son savoir, sa compétence, son état d’esprit et son sens de l’engagement, sont en mesure de contribuer collectivement et individuellement à résoudre les problèmes et à éviter qu’il s’en pose de nouveaux pour l’avenir. » (Charte de Belgrade, octobre 1976).

Et c’est en 1976 qu’est née l’asbl Education-Environnement, à Liège, et, en 1978, le Parc Naturel Hautes Fagnes-Eifel, deux autres associations fondatrices de l’IEP.

Les premières formations de guides-nature en Belgique francophone

La première session de formation de guides-nature fut organisée en Wallonie, en 1975, à Vierves-sur-Viroin, à l’initiative des Cercles des Naturalistes de Belgique (CNB). En 1978, les CNB s’associèrent à Edudation-environnement pour ouvrir une autre session en province de Liège. Des formations de guides-nature furent ensuite proposées à Namur et à Bruxelles au début des années 80.

Le renforcement de l’ErE sur le plan international

Au plan international, la dynamique ErE se poursuit : en 1977, la première Conférence intergouvernementale sur l’ERE se tint à Tbilissi, en Géorgie (URSS à l’époque). Elle réunit des délégations de 66 pays-membres, qui formulèrent 41 recommandations destinées à promouvoir et orienter l’ERE.

L’objectif fondamental de l’ErE « est d’amener les individus et les collectivités à saisir la complexité de l’environnement tant naturel que créé par l’homme, complexité qui tient à l’interaction de ses aspects biologiques, physiques, sociaux, économiques et culturels ; ainsi qu’à acquérir les connaissances, les valeurs, les comportements et les compétences pratiques nécessaires pour participer de manière responsable et efficace à la prévention et à la solution des problèmes de l’environnement et à la gestion de la qualité de l’environnement. » (Tbilissi, 1977).

Y était soulignée également la nécessité d’une meilleure formation des enseignants et des personnes chargées de mettre en place des activités d’ErE. On y spécifia qu’il ne s’agissait pas de former des spécialistes mais de donner aux éducateurs, à quelque niveau que ce soit et dans tous les secteurs de l’éducation, les compétences et outils nécessaires pour mener à bien l’ErE. Outre un cours de base en écologie, on préconisa d’organiser des stages centrés sur une analyse cohérente de situations concrètes, sous la conduite d’une équipe interdisciplinaire de formateurs, et de prévoir, dans le cas de formation d’animateurs, une formation technique adaptée (animations, jeux de rôles, …).

Des méthodes innovantes en ErE commencèrent à voir le jour dans les pays anglosaxons. En francophonie, par contre, la place et les manières de faire des naturalistes restèrent longtemps dominantes, étant en cela en réel décalage avec le reste du monde socioculturel où les pédagogies actives et participatives fleurissaient depuis la fin des années 60.

Le Conseil de l’Europe s’est lui aussi intéressé à l’ErE et, en 1981, il adopta la définition suivante dans l’une de ses recommandations :

« l’ErE vise à reconnaître des valeurs et à clarifier des concepts en vue de développer les aptitudes et les attitudes nécessaires pour saisir et apprécier les rapports entre l’homme, sa culture et son milieu biophysique » (Conseil de l’Europe, R. 26 mai 1981).

Cette nouvelle formulation des objectifs de l’ErE se démarque de la résolution de problèmes pour se centrer sur une perspective que nous appelons aujourd’hui d’ »ancrage local ».

En Belgique francophone : naissance de l’IEP, de l’Institut d’Eco-conseil et du Réseau IDée

En Belgique francophone, plusieurs personnes – animateurs/trices en éducation à l’environnement – étaient conscientes de ce changement de paradigme et avaient été séduites par les méthodes alternatives proposées par des pionniers tels que l’américain Steve Van Matre, fondateur du mouvement « Earth Education » et de l’Institute for Earth Education.

Réunies à Roisin en 1988, certaines d’entre elles ont décidé de fonder l’Institut d’Eco-Pédagogie.

L’appellation « Institut d’Eco-pédagogie » se voulait en résonance avec l’Institut d’Eco-conseil, lui aussi en train de naître à Namur, qui inaugura en 1989 sa première session de formation, essentiellement centrée sur l’acquisition de compétences scientifiques et techniques, alors que l’IEP se spécialisait dans la pédagogie de l’environnement.

Dans le même temps, et en complémentarité avec l’IEP, 64 associations et institutions wallonnes et bruxelloises ont fondé le Réseau IDée (Réseau d’Information et de diffusion en éducation à l’environnement) en 1989.

L’IEP : un pôle d’innovation et de recherche en ErE

1. La recherche-formation-action

Au moment de sa création, l’IEP a bénéficié de l’appui du Fond de l’Environnement de la Fondation Roi Baudoin et de la Loterie Nationale afin d’explorer la faisabilité de la mise sur pied en Communauté française d’une formation longue en écopédagogie. Celle-ci devait permettre d’installer “ durablement ” des éducateurs à l’environnement confirmés dans le paysage éducatif francophone, en connexion avec l’action des écoconseillers.

Cette aide a permis de faire un état des lieux de ce qui existait comme programmes de formation en Europe, aux Etats-Unis et au Canada, et d’établir un cahier des charges assorti d’un programme de formation de 300 h aboutissant à une certification en écopédagogie. Les résultats de cette étude ont fait l’objet de la publication des deux premiers Carnets de l’éco-pédagogue, consacrés aux fondements pédagogiques de l’ErE.

Malgré ses grandes qualités, ce projet d’une formation longue en écopédagogie fut jugé trop avant-gardiste par la Région wallonne : la demande était jugée insuffisante et le pari que cela allait pouvoir déboucher sur de véritables métiers était jugé trop risqué, alors que la formation d’écoconseillers se voyait solidement soutenue.

Toutefois, la Région décida d’accorder son soutien à l’IEP pour des projets pilotes de recherches-formations-actions de courte durée, sur des thématiques environnementales diverses. Les premiers modules de formation exploraient quatre thèmes « de base » : l’eau, la forêt, le milieu rural, le milieu urbain. De nouvelles thématiques environnementales étaient chaque année proposées : le littoral, les Hautes Fagnes, l’écotourisme, art et environnement, environnement et développement, …

Des recherches-formations-actions thématiques strictement pédagogiques ont vu le jour également : L’approche systémique – La pédagogie du projet – L’approche sensible de la nature – La pédagogie du cerveau global – L’évaluation – Le travail en réseau – Les techniques d’animation – L’interdisciplinarité – Les pédagogies actives – L’utilisation des NTIC – Les méthodes de participation citoyenne – Les outils de simulation et de modélisation – Les techniques de Drama en ErE – Les jeux de rôle…

Aujourd’hui encore, la formule « modules courts » est toujours d’actualité, mais depuis 2009, le projet d’une formation longue a enfin revu le jour sous la forme d’un brevet de pratiques en écopédagogie. Cette fois, les temps étaient mûrs !

En effet, le public désireux d’acquérir des compétences en ErE s’est étoffé et diversifié au fur et à mesure de l’émergence de nouveaux métiers (agent de développement local, conseiller en aménagement du territoire, par exemple) et de nouvelles missions (des agents forestiers, des agriculteurs, des responsables d’hébergement souhaitent développer des activités pédagogiques), ainsi que du fait de la pénétration de l’ErE dans des secteurs connexes (santé, consommation, relations nord-sud, alphabétisation, tourisme, …).

Une demande de reconnaissance des formations suivies ponctuellement émergeait très clairement de la part de ces publics, mais aussi une demande de formation plus consistante afin d’acquérir des compétences en écopédagogie qui pourrait être valorisée dans de nombreux métiers.

C’est pourquoi, avec le soutien du Ministre de l’Environnement et de l’Aménagement du Territoire, Philippe Henry, l’IEP a mis sur pied un programme de formation continuée de longue durée (la formation s’étale sur un peu plus d’un an), que la Ministre de l’Environnement de la Région de Bruxelles-Capitale, Evelyne Huytebroeck, finance également.

2. Les recherches-actions approfondies

A partir de 1994, outre les recherches-formations-actions menées sous la forme de projets pilotes avec l’appui de la Région wallonne (et parfois de la Communauté française), l’équipe des formateurs de l’IEP a mené plusieurs projets de recherche-action en ErE avec l’appui des Communautés européennes (La formation d’adultes en ErE – L’évaluation en ErE – Les outils internet au service de l’ErE), pour la Région wallonne et pour la Communauté française (La pédagogie du cerveau global – Les hyperpaysages) et pour les Services fédéraux de la politique scientifique (Les outils internet au service du travail collaboratif – Les changements de comportement dans l’aménagement et la gestion des espaces publics).

3. La diversification des publics visés

Initialement, « les animateurs nature » et les enseignants ont constitué notre public privilégié, mais progressivement, celui-ci s’est diversifié et élargi. L’idée que l’environnement déborde largement le domaine de la nature a fait son chemin et les thèmes explorés dans nos stages (l’éco-consommation, art et environnement, les relations Nord-Sud, l’écotourisme, l’alimentation, l’énergie, …) ont attiré d’autres acteurs : guides touristiques, animateurs socio-culturels, personnes concernées par l’éducation à la santé, à la consommation ou au patrimoine.

La prise de conscience de l’existence d’une dimension pédagogique dans tout travail lié à l’environnement a également favorisé cette diversité du public. Assez rapidement, la notoriété de l’IEP a engendré de plus en plus de commandes de formation particulières pour un public spécifique, formations de quelques jours ou formations longues, ou encore des demandes d’accompagnement de projets, comme en témoignent ces quelques exemples choisis, révélateurs de nos premières années d’existence :

  • 1993 : Collaboration à un projet de revalorisation de femmes en décrochage avec les Femmes prévoyantes socialistes du Brabant wallon ; Conception et encadrement d’une formation longue à la pédagogie de projet (300 h) pour des animateurs spécialisés en Environnement – Santé – Consommation (pour la FESC).
  • 1995-1997 : Formation des animateurs de tous les mouvements de jeunesse « scouts et apparentés » (Projet Vert de Terre, à la demande de la Fondation Roi Baudouin).
  • 1996 : Formation des animateurs et responsables du secteur du tourisme social.
  • 1998 : Formation des animateurs de plaine (Projet Verte Plaine, soutenu par la Fondation Roi Baudouin)
  • 1999 : Formation longue d’animateurs « Nature et Environnement pour un public d’enfants et d’adolescents », pour les Femmes prévoyantes socialistes.

Dès 1993, les actions de formation se sont également développées vers la formation continuée des enseignants, dans les différents réseaux, pour le fondamental ou le secondaire.

Ainsi, nous sommes sollicités maintenant par un très large public, dont le trait commun est sans doute de viser l’éducation à la citoyenneté, une citoyenneté responsable de son environnement, proche ou lointain.

4. La demande de reconnaissance en éducation permanente

En mars 2012, nous avons introduit une demande de reconnaissance dans les axes 2 (formation) et 3.1 (création d’outils) de l’éducation permanente.

Nous sommes reconnus pour la période 2015-2019 dans l’axe 2.

 

Pour citer cet article :

Partoune, C., Destinay, P., « L’IEP, son berceau, son histoire », in « Tous éducateurs », répertoire d’outils créés par les formateurs de l’Institut d’Eco-Pédagogie (IEP), février 2013